BUISSON
L’exubérance est devenue buisson.
Urbaine, elle serait modeste pariétaire à la jointure du bitume. Champêtre, cuscute sur les bruyères de la lande. Semblables l’une et l’autre dans leur commune résistance, je les regarde avec le même étonnement.
J’ai beaucoup contemplé l’abondance des feuillages et les lacis de la ramure. Sans relâche, me contraignant à ne pas lever la mine, j’ai crayonné de ma main sismographe les enchevêtrements que la myopie souvent me dérobait. Il y a longtemps, il y eut bien des aquarelles, des éblouissements, des frémissements, de la lumière par omission sous les bouleaux des bords de Marne. C’étaient des signes d’élégance mais pas un questionnement.
Parce que la nature me laisse sans espoir, l’exubérance est devenue buisson. Référence volontairement mutilée à Moïse qui voit le buisson flamber et point se consumer, moi, je vois ceux qui se consument et je n’entends aucun nom. Deus sive natura. A moi ni l’un ni l’autre ne parlent. Et si j’ai renoncé au papier et aux collages, si facilement séduisants, si j’ai choisi la toile, qui me résiste, c’est parce qu’elle ne me « répond » pas. Chaque coup de pinceau est la question que je pose, l’ordre que j’intime, moi qui devrais courber la tête : Réponds, réponds-moi donc !
Muriel Daumal.
2 commentaires:
La peinture comme questionnement, pour aller rechercher ce que tu as au fond de toi. Voilà c'est ça !
Merci Muriel de partager avec les copines qui sont (beaucoup) trop loin ! :)
Merci, Emma, du mot que vous avez mis sur Rose Chiffon. Je suis aussitôt venu me promener dans vos splendides visions. Maurice Darmon.
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