mercredi 2 janvier 2013

le fil

 Au cours de tout ce temps, le fil aurait pu rompre, Ariane, que faisais-tu ?

*   *   *

Quinze, série de quinze petits formats qui partiront par la poste, collages, couture machine et main, soies teintes par fermentations végétales.


Les Quinze.
 Certes, tous n’avaient pas lu Tlön, Uqbar, Urbis tertius et tous ne se connaissaient pas. Les uns ne doutaient pas d’en être. Les autres se demandaient comment le hasard les avait désignés ou plutôt leur avait assigné cette place qui désormais serait la leur, ici, parmi les Quinze.
 Trois dés d’ivoire dans un gobelet de corne. Trois combinaisons : 3, 6 ,6 ou 4, 5, 6, ou encore 5, 5, 5. En soi déjà tout un prodige.
 Rien ne les avait rassemblés à ce jour sinon ce coup de dés.
 Cinq d’entre eux étaient la mémoire des pierres, neuf autres l’ombre de l’épée et celle du vent, les sentiers qui bifurquent, cet air de tango gisant sur les trottoirs de Buenos Aires et le quinzième le parfum de la trahison.
 Qu’importe ? Les voies ne sont-elles pas impénétrables ?
 Ils recevraient tous l’héritage : à chacun un coupon rescapé du naufrage, et le fragment d’une carte, peut-être un continent.
 Certes, tous n’étaient pas des arpenteurs de Babel l’incommensurable, mais voilà que le sort en faisait les dépositaires de coordonnées qui échapperaient aux satellites, aux grands calculateurs.
 C’était cela. Parmi tous les possibles, ceux-là n’étaient pas des calculateurs, voilà ce que le gobelet disait. Et leur tâche à présent serait de retrouver le continent.

 Muriel Daumal. 1er janvier 2013



1 commentaire:

Olga Theuriet a dit…

J'ai failli attendre.
(Jacqueline Bisset à JP Belmondo)

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