dimanche 6 décembre 2009

broussailles








Poussée, croissance à l'insu du regard quand tout semble mort. Désordre programmé où telles des paupières des lambeaux accrochés tremblent, déchirés. Ainsi tout se révèle-t-il, dans la plus belle indifférence.

samedi 14 novembre 2009

carnets de croquis (suite)








Quelques herbes négligées en bordure des chemins, cela suffit à mon bonheur.
J'ai beaucoup regardé les plantes et j'ai appris à les nommer, ces humbles. Aujourd'hui que ces noms m'échappent et que ne me reviennent que des syllabes en un chaos de sons proliférants, je me sens cet Adam qui retourne à la glaise, se prépare à l'oubli. Je me déprends du nom et s'apaise en moi le désir de posséder le monde.

jeudi 25 juin 2009

carnet de dessin





derrière ou devant la haie, Emma doute depuis trop longtemps...


vendredi 24 avril 2009

antipolis (2)

En 1969, donc, et surtout les après-midi d’hiver, les rues du Vieil Antibes semblaient dormir dans des murs délabrés.
Il y avait encore une herboristerie à l’angle de la place Nationale, si l’on voulait remonter par la rue Sade. Rue du Haut Castelet, après que s’y emmanche la rue des Revennes, la forge de Commodini soufflait, et un peu au-delà, le vieux Geloni sortait sa chaise en tripotant une cigarette pour suivre les jambes des filles de son regard que la chassie alourdissait. Sur le pas de sa porte, cela empestait le mazout et le vin aigre, Geloni, lui, sentait l’urine et la sueur, il marmonnait et mâchonnait on ne savait quels restes et des miettes tremblaient sur les poils durs de son menton.
Au bas du Cours Masséna, au milieu de la rampe qui rejoint par une porte voûtée la rue de l’Horloge et celle du Saint Esprit, vers trois heures, le soleil pouvait donner enfin sur la façade du marchand de couleurs.
Sans doute fûmes-nous, Josée et moi, parmi les dernières curieuses à mettre le pied dans cette boutique.
Inutile d’en chercher le souvenir, Antibes n’est plus qu’un lacis de ruelles qui suintent l’huile recuite et vomissent des pizzas. On ne devine même pas mon magasin de couleurs sous l "Irish Tavern » qui l’a remplacé.
Josée et moi, lorsque nous pénétrâmes chez le marchand de couleurs, rôdions depuis des jours sur les traces d’Audiberti.




mardi 14 avril 2009

antipolis (1)


En 1969, le vieil Antibes, comme nous appelions déjà cette partie de la ville qu’un morceau de rempart enserre sur le rocher, n’était guère qu’un village fatigué.
Il y avait peu encore, la Porte Marine ouvrait sur l’anse semée de pyramides grisâtres qui empêchaient à peine la mer, certains jours de gros temps, de venir s’écraser aux pieds de la chapelle Saint Roch. Cette anse, telle qu’elle m’apparut la première fois, le 9 septembre 1962, était plutôt lépreuse. La route, dite « du bord de mer » longeait le chemin de fer dont les talus étaient couverts de roseaux et de monceaux de détritus. L’anse se refermait sur les éperons du Fort Vauban, ensuite venait l’immense baie, et ses eaux, quelquefois écumeuses, se coloraient, vers La Fontonne, du sang des abattoirs.
Ne vous baignez pas là, disait ma tante. C’était impératif. Nous, les enfants, nous croyions que c’était à cause des tourbillons, parce qu’il y avait, «en face », une côte semblable, le long de laquelle était tracée une route dite « moutonnière », elle reliait Alger et Hussein Dey, et là, personne ne se baignait jamais. Vers La Fontonne, même si nous remontions au-delà de l’étroit tunnel qui permet aux piétons d’accéder à la mer, il arrivait que les flots dégorgent rouges sur nos culottes en coton.
Du sang s’écoulait entre les deux rives, et nous nous y baignions.
A la fin du mois d’octobre 62, nous quittâmes Antibes pour n'y revenir que sept ans plus tard.
De la route du bord de mer, seul le rivage m’intéressait, autant dire l’horizon, et ce vide où j’essayais d'inscrire les lignes de l’autre rive. Il me fallut encore quelques années pour me tourner, par-delà ces grèves désastreuses, vers les terres intérieures. Elles ne furent pas une évidence et je me suis souvent interrogée sur cette capacité que nous avons à effacer nos plaies.

dimanche 5 avril 2009

commandeurs

(victimes de commandeurs, pastel+aquarelle
sur papier Ingres, 15x15)



(grands commandeurs 100x80, acrylique sur papier)






Le monde se divise en commandeurs, petits ou grands, et en victimes de commandeurs.






mardi 24 mars 2009

cris-e et bouches d-égoût


Troisième tableau.

(Pendant toute la scène, Ana reste assise, droite sur une chaise, et pourtant c’est toujours la plage. Elle écoute sagement l’historiocrate, le logocrate et le technocrate qui font des pâtés de sable.)

Le technocrate : Cette politique a incontestablement stabilisé l’évolution conjoncturelle en termes de croissance, mais la dégradation des échanges est comparable à celle de l’environnement international.
L’historiocrate : En termes de stratégie, ces facteurs trouvent une consécration territoriale et remarquez bien qu’ils ne s’expliquent pas par la défaite militaire.
Le technocrate : Il est vrai, cher ami, que le dernier cycle se distingue du cycle qui le précède.
L’historiocrate : Avouez cependant que la situation fut moins brillante sur le plan colonial.
Le technocrate : L’impact des mouvements du prix du gaz sur le taux de croissance aurait dû ébranler la crédibilité de nouvelles baisses des taux, vous voyez bien qu’il n’en est rien.
L’historiocrate : Allons, allons, en découpant les frontières sans tenir compte des aspirations nationales les membres de la commission réunis à Volocht ne voulaient pas mettre le pays à genoux.
Le technocrate : Donc, vous reconnaîtrez que ce sont des facteurs endogènes qui expliquent les fluctuations de ce cycle.
Le logocrate : Le mot altus désigne tout mouvement en direction de l’imum, inf-imum, int-imum, super-imum. En somme, la conception des idées reste libre !
Le technocrate : Malheureusement le krach financier devrait entraîner une grande désillusion des petits porteurs.
L’historiocrate : Voyons, mon cher, l’autorité de l’Etat, et c’est la thèse tocquevillienne, vous vous en souvenez, unifie les esprits, il s’ensuivra un fort sentiment d’égalité. Démocratie, Nation, Etat, voilà le triptyque qui forme notre postulat !
Le logocrate : Vous oubliez que le langage est commandé par une grande loi d’asymétrie qui répond à une nécessité beaucoup plus profonde puisqu’elle touche à l’essence même du Logos et de la Ratio.
Le technocrate : N’empêche, il nous faut développer un capitalisme populaire, privatiser, privatiser ! Et je ne vois que deux créneaux à taux de couverture à peu près fort.
L’historiocrate : Attendez, attendez, il reste à éponger les sinistres des dix dernières années. Il ne faut plus tomber dans le piège de l’écart qui se creuse depuis le contre-choc, cette politique a provoqué l’accumulation d’impacts négatifs, on en trouvera des effets durables dans la balance des paiements.
Le logocrate : Des paix-ment. Des bégaiements. Des bègues-aimant, des caïmans, des pyromanes, des amanites, avec et sans phallus, des phalanstères, des ministères, des épiphyses et des clystères.
Le technocrate : Avoue vieille crapule…
Le logocrate : Comme un trottoir troué la peau des braves sous les drapeaux et la folie des oripeaux du grand foutoir de guerre, tiens ! Qu’est-ce que tu as fait de ma pelle, Jean-Bernard ?
Le technocrate : Fichtre, ta pelle ?
Le logocrate : Ma pelle, te dis-je !
Le technocrate : La conjoncture est délicate et l’indice du CAC incite à la plus grande prudence.
L’historiocrate : Peuples, souvenez-vous ! O ma mémoire ! Ma mémoire saturée, essorée, intubée, à dix sous l’entonnoir, et vas-y que je te gave, remets-en un petit coup, (hurlant à tue-tête la diane) soldat lève-toi ! soldat lève-toi ! etc, on connaît la chanson.

(Il se sont levés, en écrasant les pâtés de sable, et sont à garde à vous. On entend le clairon qui reprend la chanson. Ana n’a pas bougé.)


Muriel Daumal. Les dieux à fables, (extrait).

lundi 16 mars 2009

pierres, de Caillois


monotype sur papier recyclé. 60x80

Je parle des pierres qui ont toujours couché dehors ou qui dorment dans leur gîte et la nuit des filons. Elles n'intéressent personne ni l'archéologue ni l'artiste ni le diamantaire. Personne n'en fit des palais, des statues, des bijoux ; ou des digues, des remparts, des tombeaux. Elles ne sont ni utiles ni renommées. Leurs facettes ne brillent sur aucun anneau, sur aucun diadème. Elles ne publient pas, gravées en caractères ineffaçables, des listes de victoires, des lois d'Empire. Ni bornes ni stèles, pourtant exposées aux intempéries, mais sans honneur ni révérence, elles n'attestent qu'elles.


(...)


Je parle des pierres que rien n'altéra jamais que la violence des sévices tectoniques et la lente usure qui commença avec le temps, avec elles. Je parle des gemmes avant la taille, des pépites avant la fonte, du gel profond des cristaux avant l'intervention du lapidaire.




Roger Caillois, Pierres. Dédicace. Gallimard, poésie.

dimanche 1 mars 2009

vaine oraison

Ceillac. Les Crestettes, depuis les Prés Soubeyran.

Roches ou lieux, vaine oraison, la litanie des noms. Clapières, Escoyères et Heuvières, semelles de grès, silices, schistes, gabbros et ophiolites… autant en emporte le vent de nos moulins à conjurer le rien.
L’autre versant, cliché, force qui poussait au-delà, quand la force était là. Aller, porté par le désir d’un inconnu soi-même qui révèle aujourd’hui sa banale évidence.
L’autre versant, « qui toujours se dérobe », comme si, de bouche en bouche et d’année en année, répéter cela dans la commune inspiration de ceux que rien n’incite à se vautrer dans l’herbe des vallées, rendait plus transparent.
L’autre versant, qui borde notre abîme. La face de Celle que nous déguisions d’autant de noms qu’il nous était possible pour nous en faire accroire. Quel souffle nous fallait-il pour décliner notre science comme on agite dans la brume clochettes et grelots sans craindre d’allonger le pas ! M.D.

vendredi 20 février 2009

l'autre versant

des chalmettes. 20x15.
... et peut-être, cette fois, aller voir l'autre versant...

mercredi 11 février 2009

"il croyait que tout devait pouvoir se mesurer en quelques pas."

Evelyne Cail chez Alain Paire.
du 22 janvier au 5 mars.
www.galerie-alain-paire.com






des Chalmettes, en arrivant sur Rioufenc. Croquis 20x15.







Marcheur exténué Lenz traversa la montagne.





" ... aussi loin que le regard allait, rien que des sommets dont descendaient de larges surfaces, et tout était si silencieux, gris, crépusculaire. Pour lui tout devint solitude effroyable ; il était seul, tout seul. Il voulait se parler à lui-même mais il ne pouvait pas, il osait à peine respirer, tendre son pied sonnait comme le tonnerre sous lui ; il dut s'asseoir. Une peur sans nom le prit dans ce rien, il était dans le vide."



Georg Büchner. LENZ. Trad de G.A.Goldschmidt.



mercredi 4 février 2009

et rester en suspens sur l'écriture des lieux.


Evelyne Cail à la galerie Alain Paire
22 janvier - 5 mars 2009
http://www.galerie-alain-paire.com/







MD. col albert depuis les chalmettes-bois noir. croquis 20x15. 2008.

Pour remonter vers des vallées que verrouillent des chaos de marbres verts veinés de mauve, il faut suivre l’entêtement des eaux, la dure transparence des passages qu’elles arasent dans la patience des saisons. Parfois, ce n’est pas l’eau qui sourd du saillant des ardoises mais la racine d’un cembro rouge, au tronc terreux, comme frotté de sil. De terrasse en terrasse, les pins enserrent des éclats d’orgues qui s’élèvent vers les cimes où tremble le panache toujours poudreux des neiges inaccessibles. A certaines heures, c’est le rocher qui semble s’éclairer de l’intérieur d’une lumière opale à peine rehaussée par la blancheur du voile qui peu à peu se déchire en accrocs à ses dents, ses éperons, ses ergots, pour finir en lambeaux sur des pentes si raides qu’elles seront à jamais murailles, livrées au seul écho des aigles. De l’autre côté, sur le feuillet des dalles, au-delà du col où par deux fois, déjà, son pied se déroba, c’est l’Italie. Ana grimpe dans le silence. Elle suit le pas de ceux qui songèrent avant elle qu’il y a derrière les sommets une autre pente, comme il y a une autre rive, un appel qui impose au marcheur une nécessité qui ne se compte pas toujours en années de misère. Partir ne signifie pas chaque fois fuir. Certains ne s’arrêtèrent pas aux mollesses des prairies, à la douceur concave, rabotée jusqu’au pied des moraines, et poursuivirent encore, au-delà des diadèmes cruellement posés sur les fronts des rochers. Qu’allaient-ils donc chercher ces transhumants, les mains gantées de loques, les pieds chaussés de peaux, éclatés sous les ongles ? Quelle rage, quel désir en ceux-là que ne retint jamais en leurs cercles ultimes le tracé des frontières ? Déjà, sur des lignes de crête, au-dessus des vallées qui domptent la chevelure des fleuves, des rus, et des cours d’eaux, Ana connut l’ivresse de s’abandonner, de ne plus redescendre, de rester en suspens sur l’écriture des lieux.

muriel daumal. La Paix d'Izri, récit poème (extrait) 2003.





dimanche 1 février 2009

evelyne Cail chez Alain Paire


Exposition Evelyne CAIL
du 22 janvier au 5 mars 2009.
Galerie Alain Paire, 30 rue du Puits neuf. Aix-en-Provence
04 42 96 23 67

mailto:galerie-alain.paire@wanadoo.fr
http://www.galerie-alain-paire.com/


Quand les oiseaux s’absentent…

Cela devrait être un bruissement, d’ailes et d’eaux, le chuintement de l’écume aux marges de l’estran, le cri des fous, peut-être, s’ils viennent jusqu’ici, et, cependant, où les matières croisent le jusant, c’est le silence.
Comment savoir si ce sont les oiseaux d’Evelyne Cail que le visiteur qui pousse la porte de la Galerie Alain Paire regarde ? Ils sont là, certes, ils font signe, cols déployés qui brisent en oblique non pas les horizons de cobalt, de terres ou d’outremer, mais les multiples plans que l’œil, accompagné, traverse. Passeurs, les oiseaux. Car il ne suffit pas de dire « lumière », « reflet » ou « transparence » pour rendre compte des huiles et des pastels d’Evelyne Cail. Quelle langue faut-il parler qui ne soit à la fois mystère et lieu commun ? Pour que la lumière soit, comme une évidence, encore faut-il qu’elle touche sa limite, le seuil qui la retient et donne sa profondeur aux paysages étales. Aussi, les oiseaux, peut-être simples graphes griffés de bruns souples ou nerveux, accomplissent-ils ce que l’œil seul ne saurait voir sans se noyer. Et quand les oiseaux s’absentent, demeure une trouée.
Les huiles tendent vers un point d’équilibre, qu’on sent sans cesse déplacé, mais à cela s’ajoute quelque chose. Il ne devrait pas être indifférent au visiteur de percevoir les choix que la galerie a opérés dans son espace. Lorsque le visiteur se tourne vers les grandes huiles, sans doute adopte-t-il le point de vue des oiseaux qui conversent dans son dos. Alors, porté par ce langage où s’entrechoquent les becs, il lui est possible de prendre la mesure des plans mis en abyme. Tournoie-t-il lui aussi ? Toujours est-il qu’il serait vain de rechercher un point focal, même quand les eaux convergent.
Dans les grandes huiles, donc, « Clarté » vient au regard. Des pâtes qu’il serait trop simple de dire grises et solides s’étirent ou bourgeonnent à l’opposé de l’ombre. Des pâtes, oui, or ici tout est liquide et tout est décanté.
Décantation est donc le mot qui émerge, celui que le visiteur se risque à prononcer quand, tout au fond de la galerie, il découvre, comme un trésor de purs pigments que la vague déposerait à ses pieds, deux petits pastels au format horizontal très allongé. Retrouve-t-il pour recevoir enfin la simple splendeur des choses –l’écume, la mer et l’horizon- les yeux de son humaine condition ?

Muriel Daumal. 30 janvier 2009.



e. Grosholz (suite)... Alain Madeleine-Perdrillat

Il est des politesses qu'il serait sage pour moi d'apprendre. Le texte d'Emily Grosholz nous parvient dans une traduction discrète, limpide et magnifique d'Alain Madeleine-Perdrillat. S'il m'est permis d'en reproduire ici un extrait, ne boudons pas notre plaisir :

Mon ami, il me semble que nous sachions enfin
Que nous ne serons plus ici très longtemps.
Ayant franchi la montagne des cent années,
Nous en avons gagné la face sombre. Contre nos visages
Borée retombe, qui souffle le rien.

Leaves/ Feuilles. Huit poèmes d'Emily Grosholz traduits par Alain Madeleine-Perdrillat. William blake and Co. édit.
Conçu comme un livre d'artiste, le volume est en accordéon, on effeuille au verso des poèmes des... aquarelles (?) de Farhad Ostovani.

un lien

si, d'aventure, vous visitiez ces lieux, distrait, que ce lien indiqué sur la droite
http://www.galerie-alain-paire.com/
ne vous échappe. Et si, par bonheur, vous veniez à flâner à Aix-en-Provence, sachez qu'un lieu réel vous accueillera, plus fidèlement que toute image virtuelle.

samedi 31 janvier 2009

emily grosholz


Ces premiers vers du beau recueil publié chez William Blake and Co :


My friend, it seems as if we know at last

We won't be here much longer.

Crossing the mountain of a hundred years

We've gained the shadow side. Against our faces

Boreas falls, the breath of nothingness.


Leaves.


mercredi 28 janvier 2009

corps montagne


Supprimer la couleur, je m'y étais contrainte. Elle me venait comme une facilité... or voici que la couleur me fuit. Ecraser craies et pastels trois heures durant pour n'obtenir qu'un gris sale, pulvérulent, désespérant. Demain, ou plus tard, immerger le papier, peut-être y retrouver quelques traces.
Alors, replonger dans des travaux antérieurs, comme cette encre sur papier où le geste, longuement contenu, avait paru si simple et si rapide...

lundi 26 janvier 2009

hommages


En attendant un frémissement dans ce moment de "frilosité" (ou de fermentation, comment savoir ?) des travaux anciens.


Petits formats. Personnages d'une mythologie personnelle, mais très commune, appartenant à la peinture, l'histoire, la littérature. Les écritures associées aux éléments issus de la culture espagnole sont des reproductions de fragments de l'introduction à la grammaire espagnole de Nebrija (1492). La langue s'y présente clairement comme un époustouflant instrument idéologique au service de l'empire. Hommage donc aussi à ceux qui ont su déserrer l'étau.


Série de 10 collages papier de soie + acrylique sur papier recyclé. 15X15. Présentés dans expo collective lors du bicentenaire du Lycée Thiers, Marseille, en 2002. L'hommage à Gauguin, non montré ici, appartient à une coll. part.

vendredi 23 janvier 2009



Montagne. Fantôme de signe. Corps présent dont je perçois la transparence. Cette immatérialité des pierres, parfois, sous certaine lumière. Suis déchirée entre le désir d’aller et celui de rester à distance. Pour voir.
Arriver au bout de la forme.

Barbarie de mon enfance ? Non. Plus loin, lieux de lutte et de recueillement.
Je m’enfonce, m’éloigne, me semble-t-il sur un chemin qui tout à coup paraît être le mien, et je reconnais ces lieux du dedans.
Montagnes corps. Corps montagnes. Reliefs, chaos, ossatures, cadavres de la terre, sans doute, où il y eut un peu de chair. Parfois sanglots au bout du pinceau.
Empreintes. Travailler vite, très vite. Ne pas penser tableau.
(acrylique 100x100)

jeudi 22 janvier 2009

autres monts analogues


Souvent, j'ai songé à tracer ces chemins intérieurs qui ne mènent nulle part. Une cartographie de lointains et de crêtes, le pas lent et le regard perdu dès le matin.
(huile 50x40)

mercredi 21 janvier 2009

femmes de Pilate


En décembre 2004, je lis Le Maître et Marguerite, de Boulgakov, que ma fille vient de m'offrir. Ténèbres de la mémoire, des images se forment.
La même semaine, redescendant de la montagne de Lure, je m’arrête au Bleuet, la librairie de Banon, digne de la Babel de Borges. Il commence à neiger. Je découvre « par hasard » dans « l’imaginaire » de Gallimard, un Caillois dont j’ignorais jusqu’au titre, Ponce Pilate. Coïncidence avec la mise en abyme de Boulgakov. La femme de Pilate, celle qui doute, me bouleverse.
En quatre jours, ces deux textes m’ont envoyé comme la foudre ces quatre visages de femmes. Figures du doute qui se présente en rêve, images inspirées, citations détournées de grandes peintures religieuses enfouies dans la mémoire, visages absents qui sont les seuls à "poser la question".

(série de 4 pastels secs, chacun de 50x40)

lundi 19 janvier 2009

branchages d'hiver

Lever le moins possible le crayon, et pourtant trouver le geste ascendant. Se perdre dans le lacis et démêler... démêler la voix intérieure.

dimanche 18 janvier 2009

au-delà des cols...



En 1966, j’étais une très jeune fille. Entre ce qui s’appelle Canet-Plage et Saint Cyprien et qui n’était encore qu’une côte de sable bordée de roseaux, un vieil homme, en pantalon de velours comme en avaient les portefaix de Marseille et tous les paysans qui passaient restanques et bancaus au râteau pour en ôter les pierres, m’avait accompagnée le long de l’eau. Mon espagnol d’alors était aussi rudimentaire que son français, nous nous comprîmes. Il marchait un peu courbé, croisant dans le dos ses mains qui paraissaient encore terreuses. Elles étaient lustrées, comme poncées par de minces silices, dans les endroits que ne creusaient pas les rides. Chacun connaît cette attitude de l’homme qui a lâché l’outil et marche désoeuvré. Le pas est long et pourtant lent, il pèse sur l’horizon. Des images identiques, il en traîne dans la mémoire de ma génération. Déjà pour nous elles jaunissaient quand nous étions enfants, déjà elles allaient en s’effaçant dans l’album qu’une grand-mère ou une vieille tante feuilletaient en hésitant, que seront-elles dans une ou deux générations ? Il traîne également des bêtes et des attelages, et des enfants à l’air hagard qu’on venait de peigner, mouillant un peu leur chevelure, peut-être la gominant, juste pour la photo.
L’homme me montra quelques piquets de bois rongés de sel et sur lesquels des restes de barbelés s’étaient comme incrustés. On était là. Nous étions là. On nous avait donné des couvertures et on creusait le sable pour se protéger du vent d’autan. On était dans un camp, tu le crois ? Un camp sur cette plage. D’ici, on entendait les bruits de l’aviation et même les bombardements.
L’homme avançait toujours, et moi je le suivais. Plus loin, il désigna une cabane faite de roseaux dont la base était fichée dans un mortier de chaux. Au bout de quelque temps, on a fait des cabanes comme ça... il faisait froid.
L’homme parlait peu. Je devais deviner.
Du doigt, j’avais pointé Cerbère. Vous n’êtes jamais retourné ? Et son regard m’avait suffi alors.
Moi, je n’étais encore jamais allée là-bas et cet exil me tourmentait.
Depuis, j’avais vécu avec un peuple de fantômes, ils ressemblaient à ce vieil homme courbé qui avait dû aussi me réciter quelques vers en regardant la côte, les yeux mouillés. Ces fantômes défilaient, vêtus de couvertures, j’entendais leurs murmures et je scrutais leurs yeux. Certains se tenaient en lisière, aux confins d’une côte, aux dernières marches d’un col qu’il suffisait de franchir et j’attendais de les faire passer. (carnets 2008)

monts analogues


Cette nuit je saurai si le liseré qui borde les sommets est une frange de neige ou un front de calcaire rongé par les gelées.

(extrait de Miramont).

samedi 17 janvier 2009

arbres...


ne jamais voir que le fantôme des choses... recommencer encore, être hanté.

dimanche 11 janvier 2009

Esparron.


Eliminer la ligne, le contour, ne jamais lever le crayon. Difficile de photographier les gris du graphite.